Cherchez quels comics Vertigo lire et on vous recommandera toujours les mêmes titres. A raison, bien-sûr. Sandman est un chef d’œuvre. Fables est un univers merveilleux. Mais entre le catalogue Vertigo proposé en France et les recommandations similaires, on en vient à réduire malgré nous toute l’étendue des publications qualitatives du label.
Et pour solutionner ce problème, nous vous proposons un guide de lecture un peu particulier qui reviendra chronologiquement sur les titres marquants du label. Certains coups de cœur méconnus passeront à la trappe comme de nombreux titres de Peter Milligan et J. M. Dematteis, mais vous trouverez en ce guide tout ce qu’il faut retenir des publications Vertigo.
1986 – 1993 : Avant Vertigo…
Créé en 1993, le label a pourtant eu des séries ayant mené à sa création. Et celles-ci sont grandement portées par des artistes de la fameuse « british invasion » sous la supervision de Karen Berger. Si vous souhaitez piocher parmi les récits cultes ayant mené à la création du label, vous êtes au bon endroit !
Swamp Thing (1986)
Scénario : Alan Moore – Dessins : Shawn McManus, Ron Randall, Rick Veitch, Stephen Bissette, …
Alors que le film Swamp Thing venait de sortir, DC en a profité pour relancer une série intitulée Saga of the Swamp Thing. A partir du #20, Alan Moore reprend le flambeau et s’approprie radicalement le titre pour signer le run le plus marquant sur le personnage. Le duo Alan Moore et Stephen Bissette a marqué une première étape d’importance, sans laquelle Vertigo n’aurait jamais vu le jour.
Avec un message environnemental fort et une histoire d’amour tragique, Saga of Swamp Thing annonce l’impact qu’aura Alan Moore sur l’industrie. Il y propose un comics réflexif et contemplatif, joue avec la morale et l’introspection d’une créature se demandant ce qu’elle peut avoir d’humain.
Doom Patrol (1987)
Scénario : Grant Morrison – Dessins : Richard Case
Les années 80, c’est aussi l’arrivée de Grant Morrison sur la Doom Patrol. Lancée en 1987 sous la plume de Paul Kupperberg, notre scénariste écossais débarque au #19 en 1989. Si vous cherchez du Grant Morrison original, sans pour autant être d’une complexité folle, vous trouverez ce qui compte parmi ses meilleurs travaux.
Il transforme cette série campant les positions des X-men, titre à succès de l’époque, en un groupe de marginaux et de monstres. Il met en avant les troubles et ne cherche pas à cacher la triste réalité. Personne ne les respecte. Ils sont les derniers héros qu’on appellerait. Ils œuvrent dans l’ombre pour protéger une société qui les a rejeté. Morrison revitalise la série en lui inculquant ce qu’il y a de plus étrange et d’audacieux pour lui construire une véritable identité.
Et après ? Flex Mentallo (1996)
Scénario : Grant Morrison – Dessins : Frank Quitely
Mini-série dédiée à l’un des personnages secondaire du run de Morrison, le scénariste revient sur cette étrange création pour la développer. Histoire très méta et personnage kitch au charme étrange, le tout dessiné par le brillant Frank Quitely. Flex Mentallo est une petite merveille servie comme un prolongement de l’expérience Doom Patrol, mais qui se trouve être un must-have pour tout amateur de Morrison.
Hellblazer (1988)
Scénario : Collectif – Dessins : Collectif
Dérivé de Swamp Thing, le personnage de John Constantine a su trouver son public. A tel point que DC a décidé de lui offrir une série secondaire. On y suit les aventures de ce détective de l’occulte. Très variées, la (longue) série propose de nombreuses versions selon les scénaristes ayant tous marqués de leur empreinte l’univers du personnage : Jamie Delano, Peter Milligan, Brian Azzarello, Mike Carey, Garth Ennis, Warren Ellis, … Si vous aimez les enquêtes, l’occulte et les anti-héros charismatiques, vous allez adorer Hellblazer.
Animal Man (1988)
Scénario : Grant Morrison – Dessins : Chas Truog
Une fois n’est pas coutume, retour sur Grant Morrison. Cette fois-ci, avec Animal Man. Comme pour Doom Patrol, nous nous trouvons dans les années 80, et dans ce souci de réinventer ses personnages, DC Comics fait appel à de jeunes talents. Grant Morrison va alors profiter des libertés accordées par son éditrice Karen Berger pour marquer l’histoire.
Après une rencontre avec un vaisseau spatial, Buddy Baker a acquis la capacité d’emprunter temporairement les attributs des animaux. Mais sous cette origin-story kitch à souhait, Animal Man est riche de thématiques modernes et d’un méta-commentaire sur le récit super-héroïque en générale. Animal Man affronte des extraterrestres, des écoterroristes… et même son scénariste !
Sandman (1989)
Scénario : Neil Gaiman – Dessins : Sam Kieth, Kelley Jones, J. H. Williams III, Chris Bachalo, Jill Thompson, …
Le titre le plus iconique de Vertigo a été initialement publié par DC Comics, puisqu’il s’agit d’une réinvention du super-héros créé par Jack Kirby. Mais Neil Gaiman va transformer tout ça pour donner à son personnage une nouvelle identité et d’autres noms, dont celui de Dream ou de Morpheus. Le seigneur des rêves est l’un des sept frères et sœurs qui incarnent différents aspects de l’univers. L’histoire raconte le voyage de Dream qui, après avoir échappé aux griffes d’un occultiste, va se lancer dans sa propre quête, celle de reconstruire son royaume détruit.
Il serait impossible de résumer en quelques lignes l’étendu d’un univers aussi riche. Neil Gaiman est un maître en la matière, et Sandman est sans équivoque l’une de ses œuvres maitresses. Elle regroupe une quantité incalculable d’influences, littéraires, mythologiques, historiques, sans parler de l’amour de l’auteur pour la culture populaire. Tout ceci, regroupé dans un univers harmonieux et riche de réflexions sensibles et philosophiques sur la vie, la mort, l’injustice.
Séries Spin-off :
- Death
- The Dreaming : Beyond the Shores of Night
- Destiny : A Chronicle of Deaths Foretold
- Books of Magic
- God Save the Queen
- Sandman Presents : …
- Lucifer
- The Dead Boy Detectives
Books of Magic (1990)
Scénario : Neil Gaiman – Dessins : John Bolton
Tim Hunter est un garçon ordinaire, mais seulement à première vue. Il porte en lui un potentiel pour développer des dons extraordinaires : la magie. Un choix s’impose. Va-t-il mener une vie ordinaire ou se lancer dans la découverte de la magie ? Pour l’aider à faire ce choix, Tim se voit offrir une visite du monde de la magie par quatre des plus grands mages de l’univers DC. Chacun lui présentera un aspect de ce monde, plus ou moins attirant.
Souvent comparé à Harry Potter, gardez à l’esprit qu’il s’agit tout de même de Neil Gaiman et que la comparaison s’arrête bien au jeune brun à lunettes. Cette mini-série en 4 numéros écrite par Neil Gaiman, lui-même, est également une énième collaboration entre Gaiman et John Bolton. Ce peintre développe un style en accord avec l’écriture littéraire de Gaiman. Le succès du titre a mené à la création d’une série régulière en 1993. Books of Magic fait partie de ces séries spin-off qui étendent toujours plus ce fameux Sandman Universe.
Shade the Changing Man (1990)
Scénario : Peter Milligan – Dessins : Chris Bachalo
Très certainement éclipsé par le succès de Sandman, Shade the Changing Man est un titre pour le moins marquant écrit par Peter Milligan. Shade doit convaincre quelqu’un de sa véritable identité avant que les personnes originaires de sa dimension ne déchaînent la folie à travers l’Amérique. Mais la seule personne qu’il a convaincue jusqu’à présent est la fille d’une victime d’un tueur en série – le même tueur condamné dont il a pris possession du corps.
Il s’agit d’une profonde plongée dans l’étrange. Le rythme et les concepts sont parfois difficiles à suivre. Les personnages ne cherchent pas à nous plaire, et le récit n’offre pas toujours de réponses à ses problèmes. Malgré cela, c’est une merveille expérimentale où l’on profite des débuts d’un Chris Bachalo aux dessins dans un exercice très étrange où il excelle.
Black Orchid (1991)
Scénario : Neil Gaiman – Dessins : Dave McKean
Seconde collaboration entre Gaiman et McKean, Black Orchid est la mini-série de Neil Gaiman la moins connue de Vertigo. Il s’agit d’une histoire de passage à l’âge adulte, associant Black Orchid, un personnage oublié de l’univers DC à la Sève (Poison Ivy, Swamp Thing). Black Orchid est donc une femme-plante qui, tout comme Swamp Thing, renaît avec de grands pouvoirs indéfinis.
Coincée entre les souvenirs de la femme qu’elle était autrefois et le mystère de ce qu’elle est devenue, Black Orchid recherche des informations auprès de ceux qui ont connu son créateur. Une œuvre maintenant un flou intriguant et sublime. Dave McKean excelle, se surpasse sur cet album resté malheureusement bien discret.