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Ennemi icônique de Spider-man, le Bouffon Vert est le nemesis par excellence. Il entretient un rapport personnel et dérangeant aussi bien avec Peter Parker qu’avec Spider-man. Figure paternelle catastrophique, conséquence d’un manque cruel d’attention, tout est bon pour conserver le masque au sein de la famille Osborn. Et si Spider-man et Norman ont partagé de grands instants, plusieurs récits ont amené à ce prestige.

L’origine du mal

Sous ce costume violet et vert kitsch à souhait, le Bouffon Vert ne fait pas rire. Il fait partie de ces exceptions qui profitent d’un passé lourd de sens et dont le costume est associé à des événements d’importance. Un costume à première vue ridicule, qui ne devait pas en être un.

Le Bouffon Vert apparaît dans Amazing Spider-man #14. Stan Lee souhaitait à l’origine que le Bouffon Vert soit une créature mythologique. Steve Ditko refuse et souhaite en faire un être humain et lui donner une identité secrète. Stan Lee aime l’idée et veut en faire un membre de l’entourage de Peter Parker. Steve Ditko s’y oppose. Selon lui, le Bouffon Vert ne devait jamais être découvert. On retrouve là la philosophie de Ditko, où le mal masqué est introuvable. Il aurait été objet de suspense et de questions sans réponse. Mais une fois Ditko parti de chez Marvel après Amazing Spider-man 31, Stan Lee révèle l’identité du Bouffon Vert dans Amazing Spider-man #38.

Non loin de la philosophie de Ditko, Stan Lee fait apparaître Norman Osborn, le père du meilleur ami de Peter Parker : Harry. En faisant de Norman le Bouffon Vert, Lee laisse entendre que le danger est bien plus grand lorsque notre ennemi fait partie de notre entourage. Peter ne peut pas fuir et doit subir ce hasard où se mêlent amitié et justice.

Lee crée ensuite un lien entre Norman Osborn et Peter Parker. Le Bouffon Vert découvre l’identité secrète de Spider-man et le kidnappe. Il lui révèle son véritable visage et ses motivations. S’en suit un affrontement rendant Norman amnésique. Mais ce retour au statu-quo ne pouvait pas durer longtemps. Norman reprend connaissance de son alter-ego et enfile à nouveau le costume du Bouffon Vert.

Sous le ridicule du personnage se cache le plus grand mal. Il est la forme physique d’un mal intérieur, des souffrances psychologiques, celles de celui à qui tout sourit de l’extérieur mais qui souffre de bien des maux, faute d’ambitions élevées et d’une vie familiale désastreuse.

Le symbole du bouffon se livre à plusieurs interprétations. Le bouffon se veut perturbant et ridicule dans son costume, mais malicieux et est souvent associé à la colère divine. Sorte de Lex Luthor bis, Norman Osborn est un roi égocentrique et orgueilleux. A la fois roi et bouffon, il se fait détenteur d’un pouvoir économique et d’un pouvoir divin défendant ses propres intérêts, en s’élevant au dessus des lois.

La relation entre Norman et Peter ne va faire que se détériorer avec le temps. Lorsque le Bouffon Vert tue Gwen Stacy dans Amazing Spider-man #122, c’est une vengeance réclamée à la fois par Spider-man, Peter, et par les lecteurs. Les auteurs de ce numéro (Gerry Conway et Gil Kane) seront même menacés de mort et écartés de toute convention pour leur sécurité. Spider-man est sur le point de tuer son ennemi lorsqu’il reprend ses esprits et refuse d’être un meurtrier. Le Bouffon Vert positionne son planeur prêt à tuer Spider-man, mais manque son coup. Il s’empale sur son planeur, crucifié à un mur dans une ruelle. Une scène iconique que Sam Raimi ne manquera pas d’adapter dès le premier film de sa trilogie. Preuve supplémentaire que le Bouffon Vert est un personnage iconique et nécessaire à l’existence de Spider-man.

Le masque en héritage

Harry peine à surmonter la mort de son père. Dans son souci de plaire à son père, dans sa quête de fierté impossible à satisfaire, il va endosser le rôle du Bouffon Vert dans Amazing Spider-man #136. Ce rapport logique entre Norman et Harry va nourrir cette notion d’héritage. Symbole du mal et du plus grand ennemi de Spider-man, le Bouffon Vert survit comme symbole et non comme être humain.

De cet héritage, Harry Osborn va souffrir de cette dépendance à la drogue, des troubles psychologiques de son père, mais est également sous l’influence de ses amis. Il se sacrifiera pour sauver son meilleur ami dans Spectacular Spider-man #200. Et en ça, il dénote avec la panoplie d’antagonistes présents sous ce même étendard. En 1983, le Super-Bouffon (Hobgoblin) apparaît pour la première fois dans Amazing Spider-man #238. Possédant diverses identités, leurs existences ne fait qu’appuyer l’influence posthume du Bouffon Vert.

Spider-man : Legacy of Evil

En 1996, Kurt Busiek écrit un numéro spécial aux côtés de Mark Texeira intitulé Spider-man : Legacy of Evil. A priori bien méconnu, ce récit est une pierre angulaire dans l’histoire du Bouffon Vert. Norman et Harry sont morts. Ben Urich réalise des recherches sur le Bouffon Vert mais peine à comprendre la relation entre Spider-man et son nemesis. Il sait qu’un élément lui échappe. Alors qu’il souhaite interroger Liz sur le rapport entre Harry, Norman et Spider-man, trois femmes portant un costume noir similaire au Bouffon Vert, et se déplaçant sur les mêmes planeurs font leur apparition. Elles s’en prennent à Normie Osborn, le fils que Harry a eu avec Liz Allan. Spider-man ne parvient pas à les arrêter, et elles emmènent l’enfant.

Une fois l’enquête menée et Ben Urich protégé, Spider-man part sauver Normie. Pas de grand retour, mais un programme créé par Norman afin de s’assurer que son petit-fils prenne la relève, et endosse plus tard le costume du Bouffon Vert. Spider-man l’arrête à temps. Alors que l’histoire semble se concentrer sur cette idée d’héritage chez les Osborn, Kurt Busiek déploie toute l’influence de cette identité malfaisante. Les dernières planches présentent Ben Urich face à son manuscrit, refusant de révéler le rapport personnel entre Spider-man et Norman. Proche de la vérité, Ben Urich révèle une éthique journalistique. Dans les dernières cases, son neveu s’interroge sur le sujet de son père et demande s’il peut lire son manuscrit. Ben répond qu’il ne voit pas pourquoi il ne pourrait pas.

S’ouvre alors un dernier plan révélant le visage du bouffon vert surplombant le paysage urbain. La menace n’en est que plus grande. En écrivant ce livre, Ben Urich ne fait que répandre ce mal. Et son neveu sera le premier à en souffrir, puisque Dan Slott en fera le nouveau Super-Bouffon dans son run sur Spider-man. Une réinvention en toute logique s’il on tient compte de ce one-shot et sa fin ouverte aux spéculations.

Cette conclusion et cette évolution du Bouffon dans l’univers Marvel nous amène à cette sensation de compromis entre les idées qu’ont eu Stan Lee et Steve Ditko. Le Bouffon Vert est un rôle indéniablement tenu par Norman Osborn. Mais le temps a multiplié les porteurs du masque, développé un culte autour de l’image du Bouffon et d’un mal secret. Si le Bouffon Vert est bien la représentation de Stan Lee, le Super Bouffon embrasse la conception de Ditko avec certains porteurs du costume à l’identité incertaine. Ces deux itérations sont néanmoins liées, par un même thème qu’est celui de l’héritage, ou plutôt, de la malédiction.

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